Congrès 2017

Document thématique
RFIQ-D2


Télécharger au format PDF | English version

Introduction

Depuis sa fondation en 1987, la Fédération a su garder le cap sur ce qu’elle entendait incarner : être la voix des professionnelles en soins. Elle est également une organisation au cœur de la santé des citoyennes et des citoyens qui bénéficient des soins offerts par ses membres. La coexistence de cette double responsabilité envers les patient-e-s et ses membres est la raison d’être de l’engagement de la Fédération. Depuis 30 ans, la FIQ n’a pas cessé de dénoncer les menaces pesant sur le système public de santé québécois et de se positionner contre les partisans de la marchandisation des soins de santé et les adversaires de la justice sociale. Plus récemment, la Fédération s’est même permis d’assumer sa capacité d’innovation en incarnant le syndicalisme de proposition.

C’est ce qui a permis à l’organisation de se positionner en 2014 sur quelques pistes d’action vers de « nouveaux modèles ». Ces derniers visaient notamment le renouvellement des services publics en apportant des solutions à l’inadéquation entre les besoins de soins des communautés et l’offre de soins. Également, la Fédération a étendu sa conception des nouveaux modèles afin de travailler à redynamiser sa démocratie syndicale, améliorer la participation de ses membres et repenser ses alliances.

La Fédération est à l’affût des conditions gagnantes pouvant mener à la création d’une nouvelle force syndicale en santé; la mise en place de FIQ | Secteur privé en est le premier jalon. Dans un souci de renouveler les services publics, la Fédération s’est également impliquée dans la mise sur pied d’initiatives locales visant l’implantation des cliniques de proximité ainsi que dans l’élaboration d’une offre alternative d’hébergement des personnes âgées en partenariat avec le milieu communautaire. Toutefois, ces nouveaux modèles ont été menés en tant que projets pilotes et ils ne pouvaient pas avoir l’ambition de s’implanter uniformément et à grande échelle. En conséquence, ils se sont déployés de différentes façons depuis 2014. L’idée générale soutenant cette volonté reste toujours d’actualité pour la FIQ : faire place à la créativité et oser faire des choses autrement.

Il est donc opportun de s’appuyer sur le chemin parcouru au cours des 10 dernières années pour concevoir le projet de l’organisation. Par conséquent, le congrès 2017 est animé par l’idée que « l’approche nouveaux modèles » soit relancée à plus grande échelle et qu’elle s’intègre à la gestion quotidienne du contrat de travail collectif.

1. Se renouveler comme syndicat : un enjeu contemporain

Déjà, la réforme du système de santé bouleverse en profondeur le paysage syndical québécois. D’où l’urgence d’un débat sur ce qui demande à être fait pour assurer une véritable mobilisation contre les adversaires de la justice sociale.
Christian Nadeau
« Agir ensemble : penser la démocratie syndicale » (2017)

Les commentateurs de la droite clament la fin du syndicalisme depuis longtemps. À l’ère de la post-véritéi, rappelons qu’aux États-Unis, au Canada et au Québec, les taux de présence syndicale ont diminué en moyenne d’à peine 1 % entre 2006 et 20151. Par exemple, à la fondation de la Fédération en 1987, le taux de présence syndicale au Québec se situait à 40,7 % par rapport à 39,6 % en 2015. Cela dit, il ne faudrait pas croire que le mouvement syndical se porte bien et qu’il n’est plus pertinent de s’inquiéter de sa vitalité. Au contraire!

Le courant du « renouveau » a émergé à la suite de ce qui était décrit comme une période de crise de légitimité et de déclin. Les syndicats devaient dès lors se remettre en question et étendre leur action pour accroître leur influence. Certains ont théorisé le syndicalisme de « mouvement social »2; d’autres, « de proposition »3. Ces concepts ont été abordés lors de congrès précédents. Nous sommes encore aujourd’hui dans cette période de renouveau et d’ouverture à la créativité. Toutes les idées qui peuvent « sauver » les syndicats de leurs tendances conservatrices et paralysantes sont les bienvenues.

Plus près de nous, la catégorie « Soins de santé et assistance sociale » occupe la plus grande part des emplois avec un taux de 14 % au Québec. À elle seule, cette catégorie compte pour près du quart du taux global de présence syndicale dans notre province! C’est dire qu’en 2017, la figure classique du syndiqué, un homme qui occupe un emploi manufacturier4, fait place à un panorama plus diversifié où les femmes prennent de plus en plus de place et où le secteur public s’impose comme l’espace névralgique pour l’action syndicale5. Il est donc normal que la Fédération prenne acte de cet état de fait et se porte à l’avant-scène des luttes sociales et politiques de notre époque.

L’action collective au temps des réseaux sociaux

Un autre changement important des dernières années : l’arrivée d’Internet et, surtout, des réseaux sociaux. Évidemment, cela a permis de faciliter les communications grâce au courriel et de rendre accessible une quantité inégalée d’informations en quelques clics. La venue des téléphones intelligents et des réseaux Facebook (2004), YouTube (2005) et Twitter (2006) a véritablement changé les règles du jeu. En quelques années, les réseaux sociaux sont devenus un lieu virtuel incontournable où les idées, opinions et émotions de quiconque peuvent devenir objet du débat public. À un point tel que l’on pourrait croire que l’action politique ou collective ait effectué une conversion numérique. Cependant, des expériences récentes tendent à démentir cette hypothèse.

À titre d’exemple, on a accolé aux évènements du Printemps arabe le titre de « Révolution 2.0 ». Les réseaux sociaux comme Facebook auraient créé l’opportunité pour ces peuples de revendiquer plus de libertés et de droits. L’expression a de quoi séduire, mais la réalité semble différente. Cette expérience nous en apprend toutefois beaucoup sur l’utilité des réseaux sociaux. D’abord, ils ont permis de faire voir, connaître et partager des situations jugées injustes ou inacceptables6. Ensuite, et surtout, les réseaux sociaux sont rapidement devenus « le GPS » pour la révolution (Où aller? Quand y aller? Que se passe-t-il maintenant?) qui se déroulait réellement… dans les rues! Il s’agissait du véritable point de ralliement des militant-e-s, connecté-e-s ou non. Cet apport logistique a été sous-estimé, mais il s’est avéré majeur lors du Printemps arabe.

Les réseaux sociaux n’ont pas créé de toute pièce ces élans de contestations populaires. Cependant, ces nouveaux outils ont véritablement permis de soutenir la lancée du mouvement en offrant aux militant-e-s et à leurs partisans des points de vue diversifiés et spontanés de la situation sur le terrain (en contraste avec la télévision d’État)7. « Révolution 2.0 » ou non, nous sommes en mesure de constater que les réseaux sociaux ont été un outil stratégique pour les militant-e-s du Printemps arabe et que nous pouvons en tirer des leçons. D’ailleurs, ces constats sont essentiellement transférables à la grève étudiante du printemps 2012, où les militant-e-s étudiant-e-s pouvaient par exemple suivre en direct sur Twitter les interventions policières et les itinéraires des manifestations avec le mot-clic #manifencours. Les réseaux sociaux étaient là aussi un outil de coordination efficace de même qu’une précieuse source d’information provenant du terrain, notamment grâce au journalisme « citoyen »8.

Les mouvements sociaux et de contestation peuvent tirer profit des réseaux sociaux. Ils ne sont pas les seuls à avoir investi ces nouvelles plateformes de communication : les politicien-ne-s s’en servent de plus en plus pour moduler leur image et envoyer des messages à un auditoire ciblé. Par exemple, le premier ministre canadien Justin Trudeau compte plus de cinq millions d’abonné-e-s à sa page Facebook et plus de trois millions sur sa page Twitter. Ses égoportraits (selfies), autant avec des personnalités publiques que des « gens ordinaires », font parler de lui dans les médias traditionnels9. Si son père avait lancé son fameux « just watch me »ii, le fils pourrait plutôt dire « just watch my selfies ».

Toutefois, l’utilisation des réseaux sociaux dans la politique canadienne et québécoise n’équivaut en rien à celle de leurs homologues américains. Le président américain Donald J. Trump continue ainsi de marquer l’imaginaire de l’Occident. À 70 ans, il n’a rien de l’utilisateur typique des réseaux sociaux. Il utilise Twitter sans réserve pour passer des messages qui se veulent authentiques, crus et qui semblent témoigner de ses émotions personnelles sur une situation donnée10. Plus encore, ses messages, courts et imprécis, ont la particularité de laisser place à l’interprétation de ses partisans : ils-elles peuvent comprendre ce qui leur plaît et ce serait l’une des clefs de sa réussite. Il est désormais en mesure de forcer les médias traditionnels écrits ou télévisés à parler de ses frasques en ligne11. Il est estimé que le candidat aurait obtenu l’équivalent de deux milliards de dollars de temps d’antenne gratuit dans les médias traditionnels américains, qui réagissaient à ses « gazouillis » (tweets)iii, et ce, seulement pendant la course à l’investiture républicaine (2015-2016).

Ses rivaux (démocrates ou républicains) n’ont jamais pu lui faire de l’ombre en ligne. Seul le sénateur de l’État du Vermont, Bernie Sanders (à 75 ans, il n’est pas non plus l’utilisateur typique que l’on s’imagine), a utilisé efficacement les réseaux sociaux pour en devenir le « roi » aux yeux d’un groupe restreint de gens, soit les jeunes urbains diplômés universitaires12. À plus petite échelle, il a exploité les réseaux sociaux pour aller chercher l’appui d’un groupe d’électeur-trice-s bien précis qui pouvaient propager leurs idées grâce au mot-clic #feeltheBern, désormais célèbre dans les campus américains.

En dépit du portrait favorable que ses partisans pouvaient brosser, à partir de leur écran, sur la course à l’investiture du Parti démocrate en faveur du sénateur Sanders, c’est Hilary Clinton qui l’emporta.

De nos jours, même l’utilisateur-trice le-la plus consciencieux-euse ne peut pas s’informer de façon neutre sur Internet en raison des « algorithmes » qui sélectionnent les contenus auxquels nous avons accès en fonction de nos habitudes de navigation. Il s’agit d’un danger bien réel du « débat » sur Internet que nous devons prendre en considération. Pour le dire clairement : il n’y a pas à proprement parler de débat en ligne. Le philosophe Christian Nadeau met ainsi en garde les organisations syndicales à ce sujet. « Sur Internet, plutôt que de s’exposer à la différence, les gens tendent à rester dans leur propre famille d’idées et de valeurs »13. En donnant une voix à une forme de dissidence mal informée, les médias sociaux posent donc un défi de taille aux organisations syndicales souvent habituées au consensus dans leur prise de décision. Même lors de la grève étudiante du printemps 2012 au Québec, tout indiquait que, sur les réseaux sociaux, « la norme semble être plutôt l’évitement que la confrontation idéologique. […] C’est avec parcimonie, retenue et prudence qu’on confronte ses idées à celles des autres »14. Cette déférence des utilisateur-trice-s rend un réel débat d’idées difficile à imaginer tout en laissant le champ libre aux utilisateur-trice-s qui verseraient dans la polémique, les trolls.

Au surplus, l’une des grandes faiblesses des réseaux sociaux tient dans l’absence de socialisation hors ligne, de relations humaines réelles15. L’activité en ligne ne se transfère pas dans la vie quotidienne des utilisateur-trice-s. Comme on l’a constaté, la force du Printemps arabe émanait de la persévérance des militant-e-s sur le terrain, qui occupaient les places et scandaient un message. De la même manière, les « gazouillis » de Donald J. Trump ou de Bernie Sanders venaient toujours en appui à une sortie publique ou lors de la participation à une rencontre partisane, là où de véritables liens pouvaient se créer entre leurs appuyeur-e-s.

La force d’un mouvement social tient encore dans les relations étroites entre les militant-e-s et entre les militant-e-s et leurs appuyeur-e-s. Les gens doivent socialiser, se connaître et développer un lien de confiance avant d’entreprendre des actions risquées pour des changements sociaux. Par conséquent, le cybermilitantisme (slacktivism) pourrait se caractériser par une prise de risque limitée, qui se borne parfois au partage de vidéos « virales », et un fonctionnement adaptable et résilient, mais inadéquat pour organiser une action structurée et durable. Un réseau, par définition, est à l’opposé d’une structure.

Les réseaux sociaux sont donc utiles pour faire connaître des enjeux et tenir les gens informés des actions en cours. Par contre, l’action politique et les changements sociaux réels ne se produisent pas par l’unique voie du Web. Nous l’avons expérimenté lors de la dernière ronde de négociations de la convention collective nationale lorsque nos membres partout dans la province pouvaient suivre en temps réel les coups d’éclat des militantes de la Fédération grâce à notre fil d’actualités Facebook. Une idée possédera une force réelle si une complémentarité est développée entre les actions hors ligne, sur le terrain, et le militantisme en ligne, sur les réseaux sociaux. Si ces derniers ont eu un impact sur l’issue des situations discutées précédemment, c’est grâce au travail de terrain et à l’utilisation astucieuse de ces outils. Vraisemblablement, l’Histoire continuera de s’écrire dans la rue.

2. Créer des attentes pour un syndicalisme plus pertinent

Nous avons vu que le syndicalisme québécois a réussi à se tirer d’affaire jusqu’à aujourd’hui. Malgré les transformations de l’économie mondiale, les syndicats existent toujours. Cependant, en tant qu’organisation syndicale, la FIQ est constamment au cœur d’un cycle qui la fait passer entre des périodes d’accalmie et des périodes de résistance. Les périodes d’agitation se sont succédé à un rythme effréné ces dernières années, forçant la Fédération à mettre sans cesse à l’épreuve sa capacité à remplir son rôle syndical.

Chaque lutte s’incarnant autour d’objectifs précis, les syndicats valorisent de façon générale la poursuite d’attentes réalistes afin de maintenir à leur portée la perspective d’ententes négociées. Cette posture pragmatique permet de canaliser l’action vers des objectifs collectifs atteignables. Toutefois, ce pragmatisme contraint dangereusement les exigences et les attentes entretenues par les membres envers leur syndicat. Des demandes audacieuses et parfaitement alignées avec leurs revendications profondes auraient probablement pour effet de les enflammer. Dans ce contexte, il existerait un risque de perdre le contrôle de la combativité de ces membres et c’est pour cette raison que les syndicats tendent à moduler leurs luttes autour d’éléments se prêtant à une conclusion négociée16. Partant de là, il faut admettre que la conciliation des intérêts menant à rendre les demandes moins audacieuses conduit directement à réduire le dynamisme des actions dans lesquelles les membres s’engageront. Bien que le risque de perte de contrôle de l’ardeur de syndiquées investies dans une lutte soit tout à fait plausible, le risque de désaffection des membres à l’égard de leur syndicat, tout aussi plausible, ne doit pas être sous-estimé.

À partir du moment où un syndicat ne sera plus en mesure de canaliser les attentes et les exigences de ses membres, sa pertinence se verra directement menacée. Le danger devient bien réel quand le syndicat se pose en tierce partie, distanciée des membres, se limitant à être une valve de pression entre des travailleur-euse-s et leur employeur17. Incarner cette tierce partie implique que le syndicat respecte toutes les règles convenues entre les parties. Cette dépolitisation de l’action syndicale peut ainsi mener à un point où la dispensation de services syndicaux à la carte et la représentation technique ou juridique, à la manière d’une compagnie d’assurance, deviennent les uniques mandats des syndicats18. Le militantisme et la sphère politique de l’action syndicale, impliquant nécessairement une certaine forme d’insoumission, d’audace et de transgression des règles, apparaissent alors en décalage avec le réel; c’est l’impasse!

La pertinence du syndicalisme de la Fédération émane dans une certaine mesure de sa capacité à améliorer les conditions économiques de ses membres. Pour être encore plus pertinent, un syndicat doit élargir le champ de ses revendications au-delà de la sphère économique et au-delà de la gestion du contrat collectif de travail. Chez nous, cette tentative de surpasser les conditions de travail pécuniaires des professionnelles en soins pour les amener sur un terrain de revendications hautement significatives dans leur quotidien s’est incarnée, dans les dernières années, par la promotion de la culture d’advocacyiv.

Cela étant dit, il est parfois « difficile de voir exactement comment se conjugueront les demandes individuelles pour dégager un objectif commun »19. Des thèmes fondamentaux nous permettent toutefois de concilier les intérêts individuels et collectifs de nos membres. Deux thèmes clefs pourraient être davantage mis de l’avant dans l’action syndicale contemporaine : la défense de la santé de nos membres et la défense de leur intégrité professionnelle20.

Le premier thème, la santé (physique, mentale et le bien-être) de nos membres, réfère à une approche plus systémique de la santé et de la sécurité au travail. Même si des lois protègent les travailleuses et travailleurs des abus des conditions de travail extrêmement dangereuses qui prévalaient au début du siècle, il n’en demeure pas moins que les professionnelles en soins exercent dans des conditions qui ne protègent pas leur santé. Notons aussi qu’à ce jour, les « maladies professionnelles » (qui sont reliées directement ou sont caractéristiques à un travail) comptent pour à peine 1 % du total des lésions professionnelles reconnues à nos membresi. Et les taux d’invalidité importants des professionnelles en soins sont révélateurs d’un problème sourd : l’intégrité physique et mentale de nos membres est menacée par leur travailv.

Défendre l’intégrité physique et mentale de nos membres, c’est « ne plus accepter qu’au nom de critères capitalistes de rentabilité et de rendement, les travailleuses et travailleurs soient soumis à un environnement et à des conditions de travail dommageables pour leur santé »21. L’un des exemples les plus évidents pour illustrer cet enjeu tient dans les heures supplémentaires obligatoires qui sont imposées à une très grande partie de nos membres. Malgré toutes les dénonciations et les promesses des représentants patronaux pour faire cesser cette pratique, la situation ne semble jamais se régler. Pour les professionnelles en soins, les heures supplémentaires obligatoires constituent un déchirement sans issue : quelqu’un souffrira de leur décision de les faire ou pas. Il s’agira des patient-e-s, des collègues, de l’organisation ou de la professionnelle en soins elle-même. Cet « empêchement d’exercer la profession avec compétence »22 crée une souffrance chez nos membres qui prendra souvent la forme de l’insatisfaction au travail et de la détresse morale. Il se crée ainsi une situation insoluble où cette souffrance en viendra à « mettre en péril la relation de caring entre le soignant et la personne soignée et causer un déséquilibre dans les sphères de la vie et d’éventuels dommages pour la santé de l’infirmière. »23 Il ne s’agit là que d’un exemple, et les professionnelles en soins sont évidemment en droit de s’attendre à ce que leur syndicat formule une réponse cohérente et efficace face à cette exigence légitime de pouvoir exercer leur profession en ne compromettant pas leur santé.

Le second thème, l’intégrité professionnelle, réfère à la souveraineté de nos membres sur leur profession. Un syndicat représentant des professionnelles ne doit pas seulement œuvrer à obtenir de bonnes conditions de travail, mais aussi à valoriser de bons emplois, autrement dit des professions enrichissantes. En défendant leur intégrité professionnelle, il devient possible de rompre avec la « médiocratie », une composante vitale de la gestion technocratique de notre société. Elle se caractérise par la place centrale que des experts de la productivité et de l’efficience occupent et des méthodes pseudo-scientifiques qui tendent à légitimer les processus décisionnels24. Cette rationalité mur-à-mur laisse évidemment peu de place à une quelconque forme de démocratie au travail. Ces experts possèdent certains traits distinctifs qu’il est facile de reconnaître chez plusieurs gestionnaires du réseau de la santé. Ils tiennent un discours qui encourage le respect des règles et de l’autorité sans se questionner, valorisent la vocation et l’abnégation au détriment de l’esprit critique. Ils s’attendent aussi à ce que les professionnelles en soins ne s’exposent pas autrement que pour faire valoir des propos « objectifs » et condamnent tout ce qui peut ressembler à une objection de conscience.

Cette dérive technocratique s’observe dans les milieux de soins québécois où, sous des vernis brillants « d’optimisation des meilleures pratiques d’excellence », se cachent des contraintes administratives et budgétaires imposant l’application de nouveaux protocoles, la mise en place de nouveaux formulaires et la compilation de nouvelles statistiques. La multiplication de ces exigences à saveur déontologique est à vrai dire une forme de déprofessionnalisation des soins qui se conjugue avec une plus grande capacité de surveillance de la part des employeurs. Plus la soi-disant objectivité des technologies de gestion occupe l’espace, moins on cherche à utiliser leur intelligence dans la réalisation et l’organisation du travail. C’est à croire que le jugement professionnel doit céder sa place à l’automatisation et à la standardisation des soins. De là, l’importance de la défense de l’intégrité professionnelle pour le syndicat et ses membres.

La dérive est telle que les professionnelles en soins sont nombreuses à partager le sentiment qu’on ne les laisse plus soigner. Pour revendiquer leur intégrité professionnelle, nous devrons être critiques et agir en catalyseur du sens critique de nos membres. L’ex-organisatrice syndicale, Jane McAlevey, de l’American Federation of Labor – Congress of Industrial Organizations (AFL-CIO), soutient que pour générer une mobilisation, les syndicats doivent mettre en place des conditions gagnantes permettant à la majorité de constater tous les liens existants entre les décisions prises par les élites économiques et politiques qui nous gouvernent (souvent difficiles à distinguer) et leur contexte professionnel. Elles doivent toutefois être appuyées pour s’opposer aux contraintes à leur jugement professionnel qui ne se limite pas qu’à évaluer la condition médicale de leurs patient-e-s.

En plus de souffrir comme travailleuses de ces multiples contraintes externes, les professionnelles en soins doivent composer avec des contraintes liées à leur statut de femme. Notamment, elles sont très souvent investies dans le travail invisible parce qu’elles sont mère ou proche aidante. En tant que professionnelles en soins, c’est vers elles qu’on se tourne naturellement pour prendre soin des autres. Ainsi, la frontière entre leur travail rémunéré et non rémunéré est particulièrement perméable. Prendre conscience de cette particularité liée à leur emploi est important pour qu’elles puissent approfondir leurs exigences à l’égard de leur vécu non seulement comme travailleuses et professionnelles en soins, mais aussi comme femmes et citoyennes.

Par conséquent, la première étape pour nos membres consiste à reconnaître les situations problématiques et les rendre visibles. La seconde étape est de reconnaître leur pouvoir de faire changer les choses et d’agir. Lorsque des femmes, des professionnelles en soins, dénoncent et se tiennent debout, elles doivent être reconnues et célébrées à leur juste valeur. Non seulement ce message peut donner du courage et servir d’inspiration à celles qui seraient instinctivement portées à jouer, elles aussi, ce genre de rôle, mais cette célébration des audacieuses lance un message symbolique clair. L’ardeur mise à discipliner les professionnelles en soins n’a d’égale que le pouvoir, souvent insoupçonné, qu’elles détiennent.

La reconnaissance et la solidarité envers ses pairs devraient être officialisées à la Fédération. Puisque l’organisation encourage ses membres à prendre la parole, celles qui, à la suite d’une dénonciation, d’une objection de conscience justifiée, ou d’une action d’advocacy, recevraient une mesure de représailles de la part de leur employeur, devraient être soutenues de façon rapide et sans équivoque.

La Fédération doit oser susciter des attentes chez ses membres. Pour ce faire, il faudra pouvoir les secouer en leur reflétant une image juste de ce qu’elles acceptent, parfois tacitement, à tort. Par la suite, il nous faudra les former afin qu’elles puissent reconnaître et accepter le pouvoir qu’elles détiennent sur leur situation immédiate. Finalement, il sera essentiel de les solidariser autour de leurs aspirations et de leur volonté d’améliorer leurs conditions de vie et de pratique. En s’accrochant à ces éléments qui s’incarnent si profondément à leur vécu de professionnelles en soins et de femmes, il n’y a pas de doute que la mobilisation autour du projet porté par la FIQ émergera naturellement. À terme, le syndicat ne devra que nourrir et canaliser l’énergie et le pouvoir de ses membres vers les instances appropriées.

Recommandation 1
Prévoir des règles au Fonds de défense syndicale pour y inclure la défense contre les représailles dans l’exercice du rôle d’advocacy subies par nos membres.

Recommandation 2
Créer deux prix (un individuel, un collectif) qui seraient remis à chaque Congrès pour souligner l’engagement syndical exceptionnel d’une membre ou d’une militante et d’un groupe de membres ou de militantes.

Recommandation 3
Élaborer une stratégie d’action visant à revendiquer efficacement l’amélioration de l’intégrité physique, mentale et professionnelle de nos membres et susciter chez elles des attentes à cet égard.

Et une des formes premières de l’action, c’est de dissiper les équivoques dont les partis extrêmes de la démocratie leurrent encore les esprits.
Jean Jaurès
« Question de méthode » (1901)

3. Notre projet syndical : prendre position

Pour être en mesure d’aller de l’avant avec nos revendications syndicales, nous devons cadrer les enjeux qui nous touchent de façon cohérente et stratégique. Prenons l’exemple des inégalités sociales qui sont souvent des injustices calculées. Un « désert de soins et de services » n’est pas le fruit de la fatalité25. Il est plutôt le résultat de la distribution politique des ressources et de la justice distributive : les inégalités de soins sont donc produites et peuvent être combattues à la source. La force de notre message viendra de notre capacité à renverser le fatalisme qui sert certains propos.

Pour revenir à notre projet, le plus petit dénominateur commun qui réunit les membres de la Fédération est le soin. C’est par le soin que notre travail est lié au destin des communautés. Le soin représente autant une action qu’une relation avec autrui. En fait, la langue française nous limite en quelque sorte dans notre réflexion sur le soin et c’est pourquoi plusieurs auteurs vont plutôt se référer à l’expression de langue anglaise du care26. Un soin est une action bien précise alors que le care ouvre la voie à une réflexion plus large. To care about, ne signifie pas donner des soins. Voilà pourquoi le mot anglais est devenu d’usage commun en français. La précision peut apparaître superflue pour certaines, mais « éduquer au politique est chaque fois un travail sur le langage »27.

Le soin est politique

La philosophie du care présente un ensemble de principes féministes indissociables de l’identité des professionnelles en soins. Ces principes sont également en phase avec les valeurs prônées par la Fédération. Très simplement, adopter une éthique du care signifie que l’on reconnaît comme condition essentielle de l’autonomie de chacune son interdépendance vis-à-vis d’autrui. Personne ne peut être ni totalement indépendant ni absolument invulnérable. Le care se traduit ainsi dans une dialectique entre autonomie et vulnérabilité. Selon la philosophie du care, toute analyse doit prendre en compte l’autonomie et la vulnérabilité de chacune pour être complète28. Le care ramène ainsi le rôle de soignante, souvent rendu invisible, à l’avant-plan.

Les relations humaines s’imposent donc comme point de départ de la réflexion plutôt que de l’action individuelle. Ces relations peuvent être certes partielles, invisibles ou asymétriques, mais elles sont toujours présentes. En toute logique, un mouvement de résistance positive devra poser des actions, mais sa force d’opposition tiendra dans les relations qui unissent ses acteurs.

La philosophie du care nous demande d’effectuer un recadrage de nos revendications pour que les soins, que toutes dispensent au quotidien, deviennent politiques. C’est ainsi que les professionnelles en soins peuvent s’éloigner des techniques, des tâches et des établissements de santé pour proposer un projet large.

Pour nous, l’indicateur clef de l’état de notre société sera l’état du soin. Nous pouvons ainsi interpeller les puissants et dénoncer leur irresponsabilité sociale. La capacité de notre système de santé à donner des soins de qualité et sécuritaires, qui relève notamment des conditions d’exercice des professionnelles en soins, doit surpasser les frontières de la convention collective. Le care signifie que les normes, que nous nous donnons collectivement, proviennent de la réalité vécue : « être du côté des relations, c’est abandonner la certitude morale pour l’inquiétude éthique »29. En définitive, la force du care vient de cette place centrale que l’on donne au vécu et aux relations des actrices. Le care invite dans le dialogue social des protagonistes qui en seraient normalement absents. Il est notre contre-discours.

Des petits projets alternatifs

Avec les congrès de 2008 et de 2011, la Fédération a effectué un changement de cap important dans sa manière de conceptualiser son action syndicale. La recommandation de pratiquer un syndicalisme de mouvement social a évolué vers un syndicalisme de proposition qui amenait le défi de proposer des projets alternatifs syndicaux autonomes et porteurs d’espoir. Le défi d’un syndicalisme de proposition se trouve dans cet arbitrage entre les stratégies proactives et les stratégies défensives qui permettent de répondre aux aspirations des membres. C’est de cette manière que la Fédération s’est invitée dans le débat public sur, non seulement la protection, mais le renouvellement du réseau de la santé. Proposer un projet qui ébranle de la sorte les structures dominantes du pouvoir, consolide la force du collectif : « la nécessité d’offrir des alternatives est une caractéristique fondamentale du syndicalisme en tant que force d’opposition »30. Par ailleurs, des propositions fortes peuvent aussi stimuler positivement l’identification des membres à leur organisation.

À partir de 2014, la pratique d’un syndicalisme de proposition à la Fédération nous a amené à défendre des projets alternatifs qui ont fait couler beaucoup d’encre. Nous y référons maintenant de façon courante par « les nouveaux modèles ». La Fédération a ainsi apporté un appui considérable à un dispensaire urbain, la clinique SABSAvi, démontrant comment le système de santé public québécois peut se renouveler en abolissant certaines barrières injustifiées à la pratique professionnelle des infirmières praticiennes spécialisées. Le projet permettait aussi de rappeler que ce renouvellement ne se réduit pas à l’antagonisme marché-État ; les communautés peuvent aussi jouer un rôle. La Fédération a par la suite appuyé d’autres projets alternatifs en Outaouais et à Montréal-Nord. Pour chacun de ces projets, l’approche demeurait la même : démontrer que les inégalités de soins sont la résultante de l’irresponsabilité des décideur-e-s. Cette dernière se traduit notamment par un cantonnement des professionnelles en soins dans une organisation médiocre où « les métiers cèdent la place à la fonction, les pratiques à des techniques, la compétence à l’exécution »31.

Un projet clair pour orienter l’action

Cet état de fait s’observe aussi dans l’état de notre société qui semble marquée par l’immobilisme. Les avancées sociales réalisées au Québec dans les années 1960 et 1970 relèvent d’une époque passée et lointaine où les luttes des travailleuses et travailleurs se sont soldées par des gains majeurs. Le peu de luttes sociales menées depuis a engendré une offre politique contemporaine plutôt terne. Le désintéressement chronique des citoyen-ne-s de la chose politique apparaît en être la conséquence. La seule variante qui s’offre aux partis traditionnels semble la droite populiste ou radicale. En effet, la montée de la droite populiste pourrait fort bien être la résultante d’une baisse des appuis politiques de toutes parts, donnant à cet électorat des airs de majorité sociale. Tout indique que la politique est en crise en raison de « l’absence d’un bloc social dominant » pour appuyer un projet collectif d’envergure32. Le philosophe montréalais Alain Denault va jusqu’à déclarer que nous vivons dans un régime politique d’extrême centre, « l’extrémisme se traduisant là par une intolérance à tout ce qui ne cadre pas avec un juste milieu arbitrairement proclamé » par les décideur-e-s33. Au final, ce centre politique a pour effet d’imposer une gestion technocratique de l’État et de nous enliser dans le statu quo sous prétexte de rigueur économique et de bonne gouvernance34.

En réponse à ce contexte, nous soutenons qu’il faut étendre l’approche « nouveaux modèles », discutée plus tôt et promouvoir un grand projet alternatif, autant dans nos milieux de travail que dans nos communautés. Devant le manque d’imagination productive des décideur-e-s, passons à l’acte! C’est ainsi que nous pouvons politiser le soin et soigner le monde dans lequel nous vivons.

Pour y arriver, la Fédération doit se doter d’une plateforme santé accessible à toutes reflétant les valeurs et les aspirations des professionnelles en soins sur toutes les sphères de la santé et des déterminants sociaux. Les professionnelles en soins sont déjà bien au fait que la santé (physique, mentale, psychosociale et le bien-être), est déterminée à la fois par les caractéristiques individuelles de chacune, le milieu de vie, le système social et l’environnement dans lequel nous vivons35. Logiquement, le cadre conceptuel de notre plateforme sera inspiré des déterminants de la santé. Défendre une éthique du care et, au surplus, de prévention, c’est faire valoir que la santé ne se résume pas à ne pas être malade.

Un projet d’une telle envergure ne peut être entrepris légèrement et exigera un débat collectif entre les militantes syndicales et les professionnelles en soins que nous représentons. Dans un premier temps, nous devrons lancer une vaste campagne de formation dans les établissements, de la même manière que nous l’avons fait avec la série de formation sur l’advocacy des patient-e-s. Ces formations permettront de sensibiliser et d’informer nos membres sur les déterminants sociaux de leur santé et de la santé des gens qu’elles soignent au quotidien. Elles seront aussi une occasion d’échanger et de présenter les propositions mises de l’avant par la Fédération et d’entendre celles de nos membres. Lorsqu’une masse critique de nos membres aura reçu cette formation, les équipes syndicales locales devront mener, dans un second temps, des actions d’information pour atteindre une part encore plus grande de nos membres et faire en sorte que celles qui auront reçu la formation participent à la pollinisation des idées derrière notre projet. Après cette période de bouillonnement, nous serons en mesure de mettre sur pied une plateforme santé qui traduira les valeurs et les aspirations des professionnelles en soins en « contraintes publiques à l’attention des puissants, au regard d’une volonté collective »36. À terme, les prémisses et les conclusions de cette réflexion devraient être accessibles sur notre site Web. Cette plateforme permettra à la Fédération de jouer un rôle assumé de think tank en santé, de réaffirmer son leadership comme organisation « au cœur de la santé » et de consolider ses stratégies syndicales à tous les paliers de l’organisation.

Recommandation 4
Poursuivre nos actions vers une culture d’advocacy pour prendre position en faveur du soin.

Recommandation 5
Susciter un débat collectif chez nos membres afin de créer une plateforme santé.

4. Se renouveler par notre ancrage régional et notre capital social

Les citoyens doivent avoir la possibilité de se parler, de s’exprimer, d’inventer. À chaque réunion, le cerveau multiplie ses voies d’association, l’œil découvre un panorama de plus en plus humanisé.
Frantz Fanon
« Les damnés de la Terre » (1961)

La vaste réforme du réseau de la santé et des services sociaux que nous venons de traverser a présenté un défi considérable pour le renouveau des syndicats du secteur public. La « réforme Barrette »vii, dont personne n’avait mentionné la nécessité auparavant, a mis en application les grands principes de l’optimisation de l’industrie privée en misant d’abord sur la centralisation de la gouvernance.

Sur le plan strictement syndical, cette réforme a entraîné la fusion des unités d’accréditation syndicale et un vote d’allégeance d’une ampleur jamais vue (plus de 200 000 syndiqué-e-s concerné-e-s). La Fédération a su tirer son épingle du jeu de cette période intense en défis et en émotions.

S’ancrer dans sa région

Conséquence de la réforme Barrette, la fusion des unités d’accréditation syndicale a créé des syndicats énormes, regroupant pour la plupart des milliers de membres et couvrant des régions entières. Cette réforme a donc unifié les forces syndicales en santé comme jamais elles n’auraient pu le faire par elles-mêmes!

Les syndicats affiliés à la Fédération sont devenus de facto des acteurs régionaux et, à l’avenir, c’est dans une perspective géographique que devrait se penser notre rapport de force syndical37. Notre ancrage régional (spatial foundation) doit devenir une priorité. Nous travaillons maintenant avec des structures syndicales qui pourront construire leurs revendications régionalement. En effet, pour utiliser un lexique manufacturier, le point de production des soins est déjà imbriqué dans le tissu social de chaque communauté et de chaque région38. Les professionnelles en soins sont constamment en contact avec les patient-e-s et leurs familles, dans les hôpitaux et les centres d’hébergement, dans la communauté ou à leur domicile. Cependant, les moyens de pression que peuvent exercer les professionnelles en soins dans leurs milieux de travail sont limités. Il est impensable de transférer davantage les responsabilités du réseau aux patient-e-s et à leurs familles dans un contexte où la qualité et l’accessibilité des soins sont en baisse depuis quelques années. Une telle stratégie aurait tôt fait de faire pencher l’opinion publique à la défaveur de nos revendications. Au surplus, bon nombre de professionnelles en soins sont aussi proches-aidantes lorsqu’elles quittent le travail : c’est à la même personne qu’on en demanderait toujours plus39! En filigrane, les professionnelles en soins ont un grand potentiel de mobilisation des collectivités où elles œuvrent. Un pouvoir qui pourrait largement compenser leurs opportunités limitées d’effectuer des moyens de pression issus du répertoire syndical traditionnel. Actuellement, ce pouvoir reste encore latent et largement inexploité. Nous devons tendre à structurer notre action autour de celui-ci.

Plus que jamais, il est primordial de dépasser nos limites, de façon à devenir plus pertinentes. S’entêter à pratiquer un syndicalisme d’affaires reviendrait à nous confiner à un agenda tronqué, limité aux matières du contrat de travail collectif et aux murs des établissements de santé.

Pour continuer à pratiquer un syndicalisme de proposition, nous devrons d’abord mobiliser les savoirs et les connaissances de nos membres sur le terrain. Elles connaissent les conséquences des inégalités de soins; il faut faire entendre la voix des personnes qui n’en ont pas. Nous devrons ensuite nous allier avec les organisations citoyennes ou communautaires qui poursuivent des objectifs semblables aux nôtres. Ces personnes vivent des inégalités de soins à d’autres niveaux et sont en mesure d’enrichir notre projet syndical. Par ailleurs, plusieurs de nos membres sont déjà engagées dans leurs collectivités. Il demeure opportun de les connaître et de créer des liens avec elles. Le défi de l’ancrage régional consiste à présenter des demandes conjointes plutôt que de supposer que les demandes formulées de part et d’autre iront naturellement de concert. Nous devons travailler à fondre systématiquement les enjeux du milieu de travail et ceux relatifs aux soins des communautés40; c’est ainsi que nous pouvons concrétiser le care par notre action syndicale.

Aucune campagne de relations publiques ne pourra nous permettre de faire l’économie du développement d’un tissu social fort sur le terrain. En toute logique, des stratégies syndicales régionales devraient être expérimentées considérant le nouvel environnement créé par la dernière réforme du réseau. Il importe de souligner le caractère social, ou relationnel, inhérent à ces stratégies. Elles peuvent stimuler notre rapport de force et élargir le champ de nos revendications syndicales, des conditions essentielles pour la viabilité d’un syndicalisme de proposition.

Tisser des relations fortes dans les milieux de travail

Il n’y a « pas de raccourci » vers des victoires syndicales. Nous ne pouvons pas prétendre gagner et cela implique de développer notre pouvoir. C’est la capacité à créer une crise qui peut générer du changement positif et cette capacité traduit notre pouvoir. L’État a du pouvoir : la crise que nous vivons depuis la récente réorganisation majeure du réseau de la santé et des services sociaux en est un exemple. Celle traversée pour les mêmes motifs il y a à peine dix ans, alors que le premier ministre actuel était ministre de la Santé, en est un second exemple. Ces crises nous ont forcées à nous adapter, mais n’ont pas résulté de nos propres choix stratégiques.

Tout d’abord, nous souhaitons mettre de l’avant l’idée que le pouvoir syndical passe en partie par la densité des relations entre les membres et entre les membres et leurs représentantes syndicales. « Une compréhension plus profonde des aspirations et des préoccupations des travailleurs est nécessaire pour établir des relations durables entre les membres et entre les membres et leur syndicat »41.

Si la FIQ veut se donner les moyens de ses ambitions quant aux orientations qu’elle désire développer dans les prochaines années, elle doit s’investir dans l’amplification du « capital social » de ses syndicats. Ce dernier correspond à peu près à « qui vous connaissez », qui celles-ci connaissent et ainsi de suite42. Le capital social est plus ou moins tangible, mais reste indispensable à la construction du pouvoir syndical tel que nous le concevons ici.

Pour stimuler notre capital social, les syndicats doivent s’organiser autour des personnes (de leurs exigences) en créant des réseaux sociaux denses à travers le parrainage d’une grande variété d’activités43. Il a été démontré que cette façon d’entrer en relation avec les membres était liée à une participation syndicale accrue et que celle-ci impliquait un plus grand engagement communautaire et politique44. Dès lors, « avec des degrés divers d’entente, de la simple complicité provisoire au consensus fort, un groupe se construit peu à peu et développe sa cohésion selon le type d’interactions qui existe entre les membres. Si l’interaction est faible ou artificielle, le groupe se comportera de manière passive face aux évènements et sera facilement divisible. Si l’interaction est forte, le groupe se comportera de manière dynamique »45.

Bien entendu, nos membres possèdent déjà l’opportunité de s‘exprimer et de s’impliquer dans les débats qui guident les décisions de leur syndicat. Cependant, les assemblées générales impliquent la plupart du temps un cadre strict et, souvent, les échanges tournent autour d’options assez peu flexibles46. Mobiliser un plus grand capital social afin de rassembler nos membres dans l’action implique d’offrir « des espaces informels où ils pourront tout simplement prendre le temps pour imaginer, débattre et ensuite faire remonter vers leur comité exécutif ce qui les anime ». L’idée ici n’est pas de mettre au rancart toutes les habitudes démocratiques issues de nos traditions syndicales. Il s’agit plutôt pour le syndicat de multiplier les « voies parallèles » pour que se développent les relations de confiance entre les gens, essentielles à l’action politique. On peut investir les lieux de socialisation actuels des membres ou en créer de nouveaux pour stimuler la participation à l’activité syndicale, mais aussi citoyenne et politique.

Il faut considérer ces opportunités informelles de contacts entre les membres comme un processus d’apprentissage qui permet à chacune de se former au jour le jour par les échanges et les discussions qu’elles entretiennent. Ces échanges seront les premières expériences de participation syndicale pour plusieurs. Pour s’assurer de répondre à ces exigences, les équipes syndicales devront exercer un leadership fort qui lancera un message sans équivoque : votre équipe syndicale est solide et elle est en mesure de remplir son mandat. Il importe de le souligner; la désaffection des lieux d’action syndicale s’explique en partie par un sentiment d’impuissance ressenti par les membres. Un sentiment qui « augmente en proportion de la grandeur du gouffre qui les sépare des lieux décisionnels »47. Travailler à augmenter le capital social dont jouit un syndicat sert précisément à combler cet espace, et faire en sorte que les actions syndicales ne soient pas désincarnées des exigences des membres.

Les syndicats peuvent agir facilement pour favoriser l’émergence d’un capital social fort en déployant de multiples opportunités de contacts entre leurs membres. Plus la diversité d’activités sera grande, plus une majorité de membres y trouveront leur compte et contribueront à la vitalité démocratique de leur syndicat. Pour avoir le pouls de ce qui se passe et des exigences des membres, nul besoin de faire systématiquement des assemblées; il suffit de multiplier des occasions d’échanges. Les possibilités sont vastes et doivent être combinées : le partage d’informations importantes sur les réseaux sociaux, les activités sociales comme des dîners offerts sur les lieux de travail, les tournées sur tous les quarts de travail, les kiosques thématiques, les sondages en ligne, les 5 à 7 d’échanges, la tenue de conférences, les rencontres réunissant des centres d’activités particuliers ou des unités locales spécifiques, la diffusion de capsules de formationsviii, etc.

Identifier ses leaders organiques

Le ciment du capital social se retrouve dans l’identification et dans l’utilisation des leaders organiques qui se trouvent parmi le collectif. Concrètement, un leader organique est une personne crédible et reconnue dans son milieu de travail. Elle sera capable d’amener ses collègues à passer à l’action, en particulier si l’action comporte des risques48. Les leaders organiques constituent de précieux leviers par lesquels s’élargissent les mouvements de mobilisation qui conduiront l’ensemble des membres dans l’action collective.

À terme, si le syndicat a bien identifié les leaders organiques, il sera en mesure de lancer rapidement des actions significatives et de susciter la mobilisation nécessaire pour apporter des changements positifs dans les milieux de travail. Il est important de comprendre qu’un leader organique n’est pas une militante syndicale par définition et vice versa. D’une part, les militantes syndicales ont accès à des ressources, des équipes et des structures qui permettent de développer une vision et de maintenir l’action dans le temps et de faire les suivis nécessaires. Avec les transformations vécues par les syndicats ces dernières années, il est essentiel de s’assurer que les nouvelles structures syndicales permettent de rassembler nos membres déconnectées (sic), jeunes et moins jeunes. La présence d’une densité de réseau pourrait s’avérer décisive pour la capacité future d’un syndicat à agir comme agent de changement. À ce sujet, il ne faudrait pas associer trop hâtivement certaines attitudes individuelles à une désolidarisation du syndicat. Le cynisme, l’individualisme, l’égoïsme ou la passivité pourraient correspondre davantage à des limites structurelles plutôt qu’à la cause du manque de contribution collective49.

D’autre part, les leaders organiques constituent le complément essentiel aux structures syndicales en étant le cœur de réseaux de relations humaines permettant à la mobilisation d’émerger dans les centres d’activités. Pour y parvenir, il est de mise de se questionner sur notre approche au regard de certaines de nos membres plus exigeantes. Si celles-ci possèdent un ascendant important sur leurs collègues de travail, il serait alors importun de tenter de les neutraliser ou de les ignorer. En réalité, elles assument souvent le rôle de porteuses des insatisfactions de leurs équipes; elles peuvent en être les leaders organiques. Plutôt que de tenter de restreindre leur ardeur et leurs exigences, il serait utile de leur donner la possibilité de se mettre en action pour changer les choses et de les accompagner dans ce processus. Leur enracinement dans leur lieu de travail et le fait qu’elles soient sur le terrain sont leur atout le plus précieux. Les syndicats ont intérêt à développer leur flair pour repérer celles qui ont ces réseaux élargis de relations, la crédibilité et le respect professionnel nécessaire pour mobiliser leurs pairs.

C’est la complémentarité des rôles entre les militantes syndicales et les leaders organiques qui rendent l’action syndicale efficace. Cette interdépendance doit être nourrie et valorisée par le syndicat. Dans tous les chamboulements que nous avons vécus depuis la fusion des établissements de santé du printemps 2015, nous avons été contraintes de naviguer dans un brouillard assez épais. Pour affirmer clairement notre volonté de mieux ancrer notre pouvoir, il y aura peut-être dans les mois à venir quelques coups de barre à donner pour parvenir à investir dans le capital social de chacun des sites où travaillent nos membres. Reconnaître des leaders organiques ne signifie pas nécessairement de les recruter comme militantes syndicales. Ce recrutement pourrait d’ailleurs s’avérer difficile puisque les leaders organiques ne sont pas toujours prêtes à mettre en jeu leur statut social en s’engageant dans une action qu’elles contrôleraient peu50. En revanche, l’une des stratégies qui pourrait être envisageable pour les syndicats serait d’identifier les jeunes professionnelles en soins qui possèdent des réseaux étendus (par leur poste d’équipe volante par exemple) et de les recruter comme pivots. Également, les membres des comités exécutifs des syndicats possèdent ensemble, par les relations sociales qu’elles entretiennent avec certaines membres, la capacité de se renseigner et de reconnaître les leaders organiques existants. En fait, cette approche revient à confier un rôle aux membres et à réitérer que le syndicat n’est pas que l’œuvre des militantes : les membres devraient être invitées à contribuer aux stratégies collectives.

En bref, il s’agit d’identifier et d’étendre les réseaux qui existent au sein de notre membership en mettant à profit les leaders organiques œuvrant dans les différents milieux de soins. Cet exercice sera possible grâce à l’investissement que chacun des syndicats fera dans la création de son capital social. Par l’élaboration de diverses activités, à l’intérieur et à l’extérieur du milieu de travail, il sera possible de lier les différents réseaux à de nouvelles ressources et de favoriser l’expression de leurs exigences et de leurs objectifs communs au plan régional.

Recommandation 6
Mettre en place un comité interdisciplinaire composé de salariées et de militantes qui aura le mandat d’assurer le suivi des recommandations adoptées au Congrès 2017.

Ce comité s’emploiera, entre autres, à :

  • stimuler les réflexions sur le capital social et l’ancrage régional de toutes les composantes de l’organisation;
  • soutenir les réflexions entourant les différentes avenues qui peuvent être envisagées pour la mise en place de l’ancrage régional et du capital social, par exemple la redéfinition du mandat des TRAC, l’utilisation des réseaux sociaux et la formation aux membres.

Conclusion

Notre ancrage régional, les liens entre nos membres et notre capacité à étendre nos luttes sont trois axes d’actions à explorer pour les prochaines années. Les enjeux de santé des populations et les enjeux de conditions de travail et d’exercice des professionnelles en soins doivent apparaître comme les deux faces d’une même médaille. Nous croyons ainsi pouvoir déployer un rapport de force plus percutant et obtenir des avancées significatives pour nos membres sur le plan de leur santé au travail et de leur intégrité professionnelle, mais aussi pour la population en général! N’oublions pas de prendre le temps de lutter pour des professions enrichissantes tout en travaillant à bonifier nos conditions de travail.

Les recommandations proposées appuient ces réflexions. Le syndicat qui demande à ses membres et à ses militantes de quitter sa zone de confort et de refuser de s’en tenir à la place que l’employeur leur concède, en exigeant de meilleures conditions de travail, doit pouvoir faire preuve d’appui et de reconnaissance. Le soutien de la Fédération auprès des professionnelles en soins audacieuses doit être rapide et sans équivoque. En conséquence, notre reconnaissance collective doit être exprimée de manière officielle et publique.

Nous croyons devoir poursuivre notre travail pour atteindre une culture d’advocacy afin de prendre position en faveur des soignantes et des soignées. Comme nous l’avons dit, cette culture ne peut être cloisonnée aux murs des établissements de santé et nous devons prendre le temps de réfléchir à un projet large. Par des discussions et des débats, nous serons capables de définir nos attentes pour un projet collectif.

La FIQ, étant une organisation syndicale ambitieuse n’ayant pas froid aux yeux, saura tirer profit des obstacles mis sur sa route par le gouvernement. Sachant qu’un petit groupe, s’il est passionné et mobilisé, peut exercer une influence énorme et faire fléchir nos élu-e-s, ne pouvons-nous pas devenir ces voix puissantes en tirant avantage du contexte et faire mentir celles et ceux qui ont cru qu’en imposant d’immenses structures, nous perdrions pied?

Soyons les porte-voix bruyants de la santé et les gardiennes du bien-être collectif en n’oubliant pas le nôtre! Soyons fières d’exercer pleinement notre pouvoir : celui de soigner.

Recommandations

Le Comité exécutif recommande :

Recommandation 1
Prévoir des règles au Fonds de défense syndicale pour y inclure la défense contre les représailles dans l’exercice du rôle d’advocacy subies par nos membres.

Recommandation 2
Créer deux prix (un individuel, un collectif) qui seraient remis à chaque Congrès pour souligner l’engagement syndical exceptionnel d’une membre ou d’une militante et d’un groupe de membres ou de militantes.

Recommandation 3
Élaborer une stratégie d’action visant à revendiquer efficacement l’amélioration de l’intégrité physique, mentale et professionnelle de nos membres et susciter chez elles des attentes à cet égard.

Recommandation 4
Poursuivre nos actions vers une culture d’advocacy pour prendre position en faveur du soin.

Recommandation 5
Susciter un débat collectif chez nos membres afin de créer une plateforme santé.

Recommandation 6
Mettre en place un comité interdisciplinaire composé de salariées et de militantes qui aura le mandat d’assurer le suivi des recommandations adoptées au Congrès 2017.

Ce comité s’emploiera, entre autres, à :

  • stimuler les réflexions sur le capital social et l’ancrage régional de toutes les composantes de l’organisation;
  • soutenir les réflexions entourant les différentes avenues qui peuvent être envisagées pour la mise en place de l’ancrage régional et du capital social, par exemple la redéfinition du mandat des TRAC, l’utilisation des réseaux sociaux et la formation aux membres.

Notes

i. L’expression a refait surface dans les médias avec le vote référendaire pour le départ de l’Union européenne du Royaume-Uni (le « British Exit », raccourci en « Brexit », le 23 juin 2016) et la course à la présidence américaine de Donald J. Trump entre 2015 et 2016. La post-vérité se traduirait par « la dangereuse tendance des démocraties occidentales à ne plus croire aux faits dans le débat politique, mais au mensonge asséné avec assurance ».

ii. Pierre-Elliott Trudeau avait répondu ainsi aux journalistes qui l’interrogeaient sur la colline Parlementaire à propos de sa stratégie pour délier la Crise d’octobre 1970. Son gouvernement avait ensuite proclamé la Loi sur les mesures de guerre.

iii. À la fin de la course à l’investiture républicaine, Donald J. Trump n’avait investi qu’un maigre 2 $ par vote, soit 120 fois moins que son adversaire Jeb Bush (241 $/vote) ou 129 fois moins que Chris Christie (257 $/vote).

iv. La culture d’advocacy fait référence à la défense des intérêts des patient-e-s par le militantisme des professionnelles en soins. La promotion des soins sécuritaires en est un exemple. La qualité et la sécurité des soins font autant référence aux résultats des soins et aux structures organisationnelles qu’aux conditions d’exercice des professionnelles en soins. Militer à améliorer ces éléments traduit la culture d’advocacy.

v. La CNESST a d’ailleurs identifié le secteur « Soins de santé et assistance sociale » comme secteur prioritaire pour ses inspections entre 2017 et 2019. La CNESST cherche à s’attaquer aux principales causes de lésions professionnelles dans ce secteur, soit les troubles musculo-squelettiques, les chutes et la violence au travail. (CNESST (2017) Santé et sécurité au travail : Planification pluriannuelle en prévention-inspection 2017-2019)

vi. La coopérative de solidarité de services à bas seuil d’accessibilité (SABSA)

vii. Le projet de loi n° 10 (Loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l’abolition des agences régionales) est entré en vigueur le 1er avril 2015.

viii. La formation, telle qu’elle a été déployée sous le thème de l’advocacy, est prometteuse puisqu’elle tend à être un catalyseur qui éveille les consciences, fait valoir l’utilité du syndicat dans un contexte positif, en dehors des litiges et favorise l’émergence d’un capital social fort.

Références

1. LABROSSE, Alexis. La présence syndicale au Québec en 2015. Québec : Direction de l’information sur le travail, 2016, 27 p.
2. CAMFIELD, David. Relations industrielles/Industrial Relations, Renewal in Canadian Public Sector Unions, 2007, 62(2), 282-304.
3. LÉVESQUE, Christian et MURRAY, Gregor. Le pouvoir syndical dans l’économie mondiale : clés de lecture pour un renouveau, Revue de l’IRES, 2003, 41(1), 1-28.
4. HYMAN, Richard. The future of unions. Just Labour, 2002, 1, 7-15.
5. MCALEVEY, Jane F.. No Shortcuts. Oxford : University Press, 2016.
6. ROSEN, Rebecca J.. So, Was Facebook Responsible for the Arab Spring After All? The Atlantic, 3 septembre 2011.
7. ISKANDER, Elizabeth. Connecting the national and the virtual : can Facebook activism remain relevant after Egypt’s January 25 uprising? International Journal of Communication, 2011, 5, 13-15.
8. DALLAIRE-FERLAND, Raphaël. Le printemps québécois vu par les médias étudiants. Le Devoir, 2 juin 2012.
9. CUMMINGS, Jordy. Justin Trudeau, l’envers d’une icône. Le Monde diplomatique, février 2017.
10. BICKART, Barbara, FOURNIER, Susan. et NISENHOLTZ, Martin. What Trump Understands About Using Social Media to Drive Attention, Havard Business Review, 1er mars 2017.
11. KHAN, Laeeq. Trump won thanks to social media, The Hill, 15 novembre 2016.
12. GABBATT, Adam. Clinton and Bush may duke it out on Twitter, but Sanders is social media king, The Guardian, 11 août 2015.
13. NADEAU, Christian. Agir ensemble – Penser la démocratie syndicale, Montréal : Éditions Somme toute, 2017.
14. GALLANT, Nicole, LATZKO-TOTH, Guillaume, PASTINELLI, Madeleine. Circulation de l’information sur les médias sociaux pendant la grève étudiante de 2012 au Québec, Centre d’études sur les médias : Université Laval, 2015.
15. GLADWELL, Malcom. Why the revolution will not be tweeted, The New Yorker, 4 octobre 2010.
16. GORZ, André. Écologie et politique, Paris, Seuil, 1978.
17. MCALEVEY, Jane F.. No Shortcuts. Oxford : University Press, 2016.
18. NADEAU, Christian. Agir ensemble – Penser la démocratie syndicale, Montréal : Éditions Somme toute, 2017.
19. Ibid.
20. GORZ, André. Écologie et politique, Paris, Seuil, 1978
21. Ibid.
22. BOUGIE, Manon. La signification du temps supplémentaire obligatoire tel que vécu par des infirmières en centre hospitalier, mémoire de maîtrise, Faculté des sciences infirmières, Université de Montréal, 2007.
23. Ibid.
24. DENEAULT, Alain. Faire moins avec moins, Revue Liberté, no 306, 2015.
25. SCHUÉ, Romain. La première clinique médicale de proximité va ouvrir à Montréal-Nord, Journal Métro, 5 décembre 2016.
26. PAPERMAN, Patricia. Le care comme connaissance et comme critique. Dans Sophie Bourgault et Julie Perreault (dir.), Le care – éthique féministe actuelle. Montréal : Les éditions du remue-ménage, 2015.
27. DESCHÊNES, Marjolaine. Diagnostiquer le discours sur le care comme symptôme d’une culture désenchantée, The Ethics Forum, 2015, 10(3), 66-100.
28. Ibid.
29. BRUGÈRE, Fabienne. L’éthique du « care ». Paris : Puf – Que sais-je? 2011.
30. LÉVESQUE, Christian et MURRAY, Gregor. Le pouvoir syndical dans l’économie mondiale : clés de lecture pour un renouveau, Revue de l’IRES, 2003, 41(1), 1-28.
31. DENAULT, Alain. Politiques de l’extrême centre. Montréal : Lux Éditeur, 2016.
32. AMABLE, Bruno. Majorité sociale, minorité politique. Le Monde diplomatique, mars 2017.
33. DENAULT, Alain. Politiques de l’extrême centre. Montréal : Lux Éditeur, 2016.
34. SAVAGE, Luke. Twilight of the Technocrats? Jacobin, février 2017.
35. DIRECTION DES COMMUNICATIONS DU MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX, La santé et ses déterminants : mieux comprendre pour mieux agir, 2012, 24p.
36. DENAULT, Alain. Politiques de l’extrême centre. Montréal : Lux Éditeur, 2016.
37. MACDONALD, Ian. Public Transit Strikes in New York and Toronto : Towards an Urbanization of Trade Union Power and Strategy, Canadian Journal of Urban Research, 2012, 21(1), 24-51.
38. MCALEVEY, Jane F.. No Shortcuts. Oxford : University Press, 2016.
39. PAPERMAN, Patricia. Le care comme connaissance et comme critique. Dans Sophie Bourgault et Julie Perreault (dir.), Le care – éthique féministe actuelle. Montréal : Les éditions du remue-ménage, 2015.
40. MCALEVEY, Jane F.. No Shortcuts. Oxford : University Press, 2016.
41. BROWN JOHNSON, Nancy et JARLEY, Paul. Unions as social capital: the impact of trade union youth programmes on young workers’ political and community engagement. Transfer: European Review of Labour and Research, 11(4), 605-616, 2005.
42. Ibid.
43. Ibid.
44. Ibid.
45. NADEAU, Christian. Agir ensemble – Penser la démocratie syndicale, Montréal : Éditions Somme toute, 2017.
46. Ibid.
47. Ibid.
48. MCALEVEY, Jane F.. No Shortcuts. Oxford : University Press, 2016.
49. NADEAU, Christian. Agir ensemble – Penser la démocratie syndicale, Montréal : Éditions Somme toute, 2017.
50. MCALEVEY, Jane F.. No Shortcuts. Oxford : University Press, 2016.

Crédits

Responsabilité politique
Marie-Claude Ouellet

Coordination
Michelle Poirier

Rédaction
Marc-Antoine Durand-Allard, conseiller syndical, secteur Tâche et Organisation du travail
Julie Rioux, conseillère syndicale, secteur Relations de travail

Révision
Myrna Karamanoukian, conseillère syndicale, service Communication–Information–Web–Traduction

Secrétariat
Luce Dessureault, secrétaire, service Communication–Information–Web–Traduction

Suggest Edit