Les infirmières du Centre hospitaliser régional du Suroît (CHRS) lancent un cri d’alarme à la population : pour être là dem
Valleyfield, le 19 février 2002 –Les infirmières sont convaincues qu’il n’y a que la population qui puisse intervenir pour que les soins de santé cessent d’être attaqués et détériorés comme ils le sont actuellement par nos gouvernements.
«Dans le réseau, il y a une croissance des dépenses de 6 % et on donnera cette année 3.2 %. C’est sûr qu’on arrive chaque année à des déficits. Si on veut répondre aux besoins, il faut combler le manque à gagner ou limiter les services.» (David Levine)
Nos gouvernements se lancent la balle à savoir qui doit payer les services de santé, le fédéral ou le provincial? En attendant, on coupe! Quand ils vont finir par s’entendre le réseau public aura atteint la taille et le coût «rentable» qu’ils visent sans le dire et le lit sera fait pour la privatisation des services.
Déficit zéro
L’atteinte du déficit zéro exigé par le gouvernement québécois avec sa loi 107 ne fait que des ravages. Son bien fondé, selon M. Levine, c’est que les directions locales rendent des comptes à la population. Dans les faits, les directions n’ont de compte à rendre qu’au gouvernement qui impose un sous-financement chronique.
Il y a des coûts non compressibles dans le systèmes : le prix des médicaments (12 % d’augmentation) et des fournitures (10 % d’augmentation). Il n’y a que sur le personnel qu’on peut couper. Pas en diminuant les salaires, ils sont convenus par convention, mais sur la taille et la composition des équipes de travail.
Dans le cas des infirmières, ces compressions budgétaires ajoutées à la pénurie constituent un mélange explosif. Le gouvernement alimente le feu au lieu de l’éteindre et, ce faisant, il met en péril la sécurité des soins et aggrave le problème de la pénurie.
Pour boucler le budget d’ici le 31 mars
Coupures d’effectifs de toutes catégories : infirmières, commis, préposés… Alors que nous devrions être en examen de l’organisation du travail pour libérer les infirmières de tâches qui peuvent être faites par d’autres catégories d’emploi, on augmente au contraire la charge des infirmières en place.
Notre salle d’urgence répond à une population importante répartie sur un vaste territoire. Jamais, à l’urgence du CHRS, nous n’avons détourné d’ambulance alors que nous recevons des ambulances qui ont été détournés du CH Lakeshore parce que leur urgence «déborde». Bravo pour notre hôpital, mais encore faudrait-il nous donner les ressources nécessaires… Au contraire, on coupe.
Plan de compression permanent
À compter du 31 mars 2002, on attend le plan de compression permanent exigé par la loi.
Les dirigeants se font rassurants et assurent la population qu’elle n’a rien à craindre que les services seront donnés différemment. Rappelons nous leur argumentation autour de l’hypothèse de fermeture du département de gériatrie active. Leurs discours maquillent la vérité.
Les infirmières ont décidé de rompre le silence et d’agir.
Elles n’ont plus confiance en leur direction qui est obnubilée par la commande de compression qui vient de Québec.
Elle n’ont plus confiance en leur gouvernement, à Québec, qui après les mises à la retraite, le virage ambulatoire sauvage, le contingentement de la formation infirmière, veut nous faire croire que l’atteinte du déficit zéro dans les établissements de santé est un mal nécessaire et temporaire. Nous ne le croyons pas. Au contraire, comme il entraîne fatalement la détérioration des services, il fera fuir la clientèle fortunée et bien assurée qui, en prétendant désengorger les services publics avec la bénédiction de l’Etat, contribuera encore plus à sa détérioration. C’est une pomme empoisonnée.
Les infirmières sont fières des services qu’elles prodiguent à la population et entendent les défendre. Cependant, elles se sentent menacées dans leur sécurité et leur santé depuis déjà trop longtemps. Elles sont découragées, excédées.
Quand le climat de travail s’est à ce point détérioré, quand la direction des soins infirmiers n’a plus que le temps supplémentaire des infirmières, obtenu souvent par le harcèlement ou la menace, la mobilité est le mot magique pour assurer les soins. Ce que la mobilité a de magique, au contraire, c’est qu’elle fait fuir les infirmières. La gestion des effectifs se fait au jour le jour, pour ne pas dire d’heure en heure.
Vous comprendrez que rien ne va plus, que la situation est intolérable. La pénurie d’infirmières est réelle. Nous sommes prêtes à regarder l’organisation du travail. Il faut remettre de l’huile dans un engrenage chauffé à blanc. C’est le contraire que font nos dirigeants. Le Suroît n’est pas une région où il est facile d’attirer du personnel infirmier. Il faut travailler à améliorer les conditions de travail pour retenir les jeunes qui acceptent de joindre nos rangs et inciter les plus vieilles à y rester le plus longtemps possible plutôt que de rêver à une retraite le plus vite possible.
– Moyenne d’âge des infirmières :
- 29 % ont 34 ans et moins
- 34 % ont de 35 à 44 ans
- 36 % ont 45 ans et plus
Les luttes qu’ont dû mener les infirmières depuis 1989 leur ont fait subir à chaque fois les foudres de la répression de l’Etat québécois. Les gains obtenus ont vite été annulés par une détérioration encore plus grande de leur situation. Il n’y a rien de consolant à se faire dire qu’on n’est pas pires qu’ailleurs.
La seule façon d’améliorer la situation des infirmières pour qu’elles soient encore là demain en nombre suffisant, c’est d’arrêter les compressions budgétaires. Et seule la population, individuellement ou par le biais des divers organismes de défense qui les représentent, peut exercer une pression efficace sur les gouvernements.
Pour toutes ces raisons, les infirmières du CHRS enclenchent aujourd’hui un premier plan d’action
- À compter de maintenant, dès que les infirmières se retrouveront en personnel réduit et qu’elles évalueront la situation dangereuse pour la sécurité des patients, et cela à la connaissance de l’employeur, elles en aviseront la population :
- par un indice de dangerosité c’est-à-dire qu’elles informeront la population qui se présente sur les unités de soins en visite ou pour des soins, du manque de personnel sur l’équipe soignante et du nombre de personnes qui travaillent en temps supplémentaire;
- en sollicitant, si elles le jugent pertinent, la présence de membre des familles pour les aider à garantir la sécurité de leur proche;
- en informant les médias régulièrement, par l’entremise de leur syndicat, de l’état de la situation sur les différentes unités du centre hospitalier.
- À compter d’aujourd’hui une enquête auprès des infirmières sera entreprise afin de dénoncer les situations dangereuses qui découlent de coupures budgétaires afin de les rendre publiques par le biais des médias.
- À l’occasion de la semaine de relâche scolaire, pour laquelle la direction a annoncé des fermetures de lits de médecine et de soins intensifs, les infirmières refuseront de revivre ce qu’elles ont vécu durant la période des Fêtes et de cautionner cette coupure de services à la population. Pour ce faire, elles refuseront d’effectuer des heures supplémentaires du vendredi 1er mars 16h00 au lundi 11 mars 07h30 et ce, jusqu’à ce que les lits fermés soient rouverts.