« Ce projet de loi est prématuré et laisse présager des dérapages importants » — Régine Laurent, présidente de la FIQ
Québec, le 15 mars 2011 — Dans le cadre de la présentation de son mémoire sur le projet de loi 127, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec — FIQ a exprimé de nombreuses préoccupations à l’égard de ce projet de loi visant à améliorer la gestion du réseau de la santé et des services sociaux. « À notre avis, ce projet de loi est prématuré. Les réformes et les bouleversements sont tels que le réseau de la santé et des services sociaux semble être dans une phase perpétuelle d’ajustements, et ce, sans se donner un temps d’arrêt, un recul nécessaire pour faire un bilan et procéder aux changements essentiels. Avec ce projet de loi, le gouvernement du Québec se lance encore dans une série de chambardements laissant présager des dérapages importants », de dire Régine Laurent, présidente de la FIQ.
Un net recul démocratique
Si la participation citoyenne aux affaires des conseils d’administration a connu une baisse au cours des dernières années, le projet de loi 127 ne corrige en rien ce net recul démocratique. « L’abolition du Forum de la population, le retrait de la représentation des organismes communautaires de même que la diminution du nombre de personnes élues par la population et de représentants des comités des usagers au sein des conseils d’administration des établissements s’avèrent inquiétants. Par ce projet loi, on vient réduire la représentation citoyenne à sa plus simple expression », de poursuivre madame Laurent.
À titre d’exemple, la Fédération dénonce que les organismes communautaires ne seront plus représentés au sein des conseils d’administration des établissements. « Ces organismes doivent avoir voix au chapitre en raison des responsabilités qui leur sont confiées par les établissements en matière de dispensation de services de santé et de services sociaux », de souligner la présidente.
Les membres des CA impartiaux?
Le projet de loi 127 introduit un nouveau critère devant guider le choix de certaines personnes qui siègeraient au conseil d’administration de chacun des établissements. « Bien que la FIQ ne s’oppose pas au principe d’introduire une notion d’indépendance, elle se questionne sur la façon dont cette notion pourrait se traduire dans la réalité et sur l’interprétation qui pourrait en être faite. Qui s’assurera que les individus accédant à ces postes seront libres de toute influence pouvant compromettre l’objectivité des décisions à prendre, de par leurs relations, leurs intérêts ou leur position? Le projet de loi 127 reste également muet sur la procédure servant à s’assurer qu’une personne répond toujours aux critères d’indépendance pendant son mandat. Un processus de surveillance de l’indépendance, s’appliquant autant aux administrateurs élus, nommés et cooptés devrait être mis en place », de dire madame Laurent.
Afin d’illustrer ses inquiétudes, la Fédération souligne que tel qu’il est rédigé et selon les critères énumérés à la notion d’indépendance dans le projet de loi, une entreprise privée de placement en soins pourrait accéder à des fonctions d’administration d’un établissement avec qui elle n’entretient pas de liens de service directs. « On peut facilement imaginer qu’un tel mandat lui permettrait de développer de nouveaux marchés », de mentionner la présidente.
Introduction de la notion de performance
La FIQ accueille positivement les comités de gouvernance et d’éthique malgré les questionnements que soulève l’application du critère d’indépendance dans sa composition. Par contre, l’instauration de comités de vérification au palier local lui fait craindre le pire. Sous le couvert d’utilisation optimale des ressources financières – la FIQ croyait que les administrateurs y veillaient déjà – se cache une approche de gestion axée sur une préoccupation ultime : la recherche de performance financière et efficiente. « On sait très bien qu’une telle préoccupation ne rime pas toujours avec qualité et accessibilité aux soins et aux services. D’ailleurs, l’introduction claire et ferme de la notion de performance dans la planification stratégique du ministère et dans la concordance qui devra être faite en ce sens aux paliers régional et local renforce notre inquiétude. À ce chapitre, il est évident que la notion de performance va teinter l’ensemble des choix qui seront faits, ce qui représente une bien mauvaise nouvelle pour le réseau public de santé québécois. Jamais la notion de performance ne devrait servir de prétexte pour réduire le panier de services, ni faire une plus grande place au privé », de conclure madame Laurent.
Le mémoire présenté par la FIQ, Une gestion améliorée? Un bilan s’impose, des questions se posent, est disponible sur son site Internet en format PDF.
À propos de la FIQ
La Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec – FIQ représente près de 60 000 membres, soit la grande majorité des professionnelles en soins infirmiers et cardiorespiratoires œuvrant dans les établissements publics québécois.