La population peut faire la différence, selon une vaste coalition
Montréal, le 18 mars 2012 — À l’aube d’une semaine intensive de mobilisation contre la hausse des frais de scolarité, une coalition de 140 organismes communautaires, syndicaux, féministes et étudiants constate la très grande sympathie de la population à l’égard de la grève étudiante. La Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics l’invite donc à se joindre plus directement au mouvement, en participant aux manifestations familiales qui auront lieu simultanément aujourd’hui à Montréal, Québec, Sherbrooke et Alma, à 13 heures, cet après-midi. À Montréal, le départ se fera du Parc Lafontaine. La coalition invite de même la population à prendre part à la grande manifestation qui se déroulera, le jeudi 22 mars, dans les rues de Montréal. Elle lui suggère également d’utiliser tous les moyens à sa disposition pour se faire entendre du gouvernement : téléphones ou visites à leurs députés, lettre ouverte dans les journaux, utilisation des médias sociaux, etc.
Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de la Coalition large de l’Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante (CLASSE) se réjouit de l’appui de plus en plus large aux grévistes: « Il y a deux ans, le gouvernement Charest osait prétendre qu’outre les étudiants, il y avait un consensus en faveur de la hausse des frais de scolarité. Or, il est maintenant évident que le consensus est plutôt de s’y opposer. Qui appuie le gouvernement, à part les recteurs d’université et le patronat? ».
Jean Trudelle, président de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), ajoute que le corps professoral se range sans hésitation derrière la grève étudiante : « Ce qui est en jeu derrière la hausse de 1625 $ par année des droits de scolarité, c’est une conception de l’éducation à laquelle nous nous opposons complètement. L’éducation n’est pas une marchandise dont la valeur dépend du prix payé par les étudiantes et par les étudiants. L’éducation, c’est un droit que le gouvernement s’est lui-même engagé à respecter en ratifiant, en 1976, le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels ». M. Trudelle estime donc que le débat dépasse de loin l’enjeu du financement des universités. Une conférence citoyenne a d’ailleurs regroupé des intervenantes et des intervenants à ce sujet, ce matin.
Alexa Conradi, présidente de la Fédération des femmes du Québec (FFQ) y a présenté une lecture féministe de la hausse des frais de scolarité : « L’accès à l’éducation supérieure ouvre la possibilité pour les femmes d’avoir un plus grand choix de carrière et de développer pleinement leur autonomie économique dans la mesure où elles n’ont pas à traîner une lourde dette. Or, la hausse des frais de scolarité risque de créer un fardeau discriminatoire pour les femmes parce qu’elles gagnent un salaire moindre au sortir de l’université, et ce, tout au long de leur vie. Certaines femmes, comme les femmes de minorités visibles ou les femmes autochtones dont le taux de diplomation demeure plus bas que les autres femmes, seront particulièrement affectées ». Elle ajoute que la hausse, qui dans bien des cas sera assumée au moins en partie par les parents, contribuera à appauvrir encore davantage les familles, dont les familles monoparentales, surtout qu’elle s’accompagnera de la taxe santé qui atteindra 200 $ l’an prochain et d’une augmentation de 20 % des tarifs d’hydro-électricité à partir de 2014.
Quant à François Saillant, coordonnateur du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), il considère indécent que le ministre des Finances, Raymond Bachand, ait affirmé que « la population doit faire sa part» pour justifier la hausse des frais de scolarité et le recours à la tarification pour financer les services publics : « Opter pour la tarification, c’est refiler la facture à la classe moyenne et aux ménages à plus faible revenu, tout en épargnant les contribuables à plus haut revenu et les grandes entreprises qui ne paient justement pas leur juste part dans le financement des services publics. Tout le monde ne fait pas sa part quand un contribuable dont le revenu annuel est de 150 000 $, 300 000 $ ou 1 000 000 $ paie le même taux d’impôt qu’un autre qui gagne 80 200 $. Tout le monde ne fait pas sa part quand, contrairement aux gains de travail, seulement 50 % des gains réalisés à la vente d’actions boursières et d’immeubles sont soumis à l’impôt. Tout le monde ne fait pas sa part quand les compagnies qui utilisent nos ressources naturelles ne paient pas suffisamment de redevances ».
La Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics considère que le gouvernement Charest a l’occasion de redresser le tir, entre autres en reculant sur la hausse des frais de scolarité, dans le budget que le ministre Bachand présentera mardi. Elle l’avertit cependant que la mobilisation se poursuivra de plus belle, s’il continue de faire la sourde oreille à la population.