Hausse des frais de scolarité
Lettre ouverte transmise aux principaux médias québécois et associations étudiantes, le 6 avril 2012.
Devant l’ampleur de la mobilisation étudiante actuelle, le Québec semble manifestement rendu à un de ces moments qui marquera son histoire et qui forgera un peu plus l’identité d’un peuple combatif qui ne se laisse plus manger la laine sur le dos, un peuple qui n’est pas né pour un petit pain. De toute notre vie, rarement avons-nous eu le privilège d’assister à l’éclosion d’un mouvement social aussi massif et solidaire, mais également aussi articulé et créatif. Sans contredit, beaucoup de gens devront réviser les préjugés tenaces qu’ils entretenaient à l’égard d’une jeunesse québécoise soi-disant individualiste, nombriliste, matérialiste, amorphe, etc. Ce mouvement de masse représente la manifestation la plus concrète et tangible que l’avenir de notre démocratie est entre bonnes mains.
Cela dit, au-delà de l’espoir que peut nous inspirer la génération montante, ceux et celles qui gèrent notre présent font preuve d’un rare mépris pour les règles et valeurs démocratiques les plus élémentaires. Même si le gouvernement libéral a été élu par moins d’un électeur inscrit sur quatre, sa légitimité n’a jamais été remise en question puisque ce sont les règles démocratiques que nous nous sommes données. Une fois élu, ce gouvernement devient le digne représentant du peuple et de l’intérêt collectif.
Contrairement à ce que tente de faire croire le gouvernement, le conflit actuel n’est pas seulement celui des étudiantes et des étudiants. Ce mouvement étudiant, et les revendications qu’il porte, est tout sauf individualiste ou corporatiste. C’est un mouvement qui s’oppose, avec une vigueur remarquable, à l’imposition d’un jalon important du virage tarifaire ou de la « révolution culturelle » du ministre Bachand. Après avoir diminué le fardeau fiscal des plus fortunés, la hausse des frais de scolarité imposée aux étudiant-e-s n’est qu’une autre tentative du gouvernement Charest, à l’instar de la contribution santé de 200 $, de récupérer les revenus manquants dans les poches de la classe moyenne et des moins nantis, par la tarification et la privatisation des services publics. Jeudi matin, ce même gouvernement annonçait de nouvelles mesures en faisant semblant qu’elles mettront un terme à la crise, alors que celles-ci favoriseront une fois de plus les banques et non les étudiant-e-s.
Démocratiquement élu, le gouvernement Charest peut et doit faire beaucoup mieux. Il ne peut pas ignorer dans le plus grand mépris un mouvement démocratique ayant mobilisé plus de 200 000 personnes de façon pacifique, sous peine de radicaliser le mouvement et sacrifier une génération complète, qui n’aura plus confiance envers les institutions démocratiques et les moyens privilégiés pour prendre part aux débats. Il est urgent que le gouvernement s’assoie de bonne foi avec le mouvement étudiant dans l’objectif d’évaluer les solutions possibles pour le financement de l’éducation supérieure.
À titre de présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec – FIQ, organisation progressiste qui a été bâtie par des professionnelles en soins qui ont lutté toute leur vie pour défendre des valeurs de solidarité, de partage, de justice sociale, et forte d’une recommandation adoptée lors de sa dernière instance large, les étudiantes et les étudiants peuvent compter sur l’appui de la FIQ dans leur lutte contre la hausse des frais de scolarité.
Régine Laurent, présidente
Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec – FIQ