Pour un modèle de formation infirmière adapté à la réalité québécoise
Au cours des derniers mois, je pense avoir tout entendu comme justification à l’imposition du baccalauréat comme seule norme d’entrée à la profession d’infirmière. Cependant, force est de constater que les partisans indéfectibles de cette position ont tendance à présenter le baccalauréat obligatoire comme un remède miracle et à faire naître de faux espoirs.
Pendant qu’on promet à la population un accès amélioré à des soins qui seraient tout à coup devenus plus sécuritaires, on parle aux infirmières d’un champ de pratique accru et on avance à qui veut l’entendre qu’un rehaussement de la norme d’entrée à la profession contribuerait à réduire les effets négatifs de la pénurie d’infirmières. Aux élu-e-s, c’est la possibilité d’économies substantielles en matière d’investissements en santé qu’on fait miroiter. Bref, on retrouve là ce que tout le monde veut entendre mais, lorsqu’on prend le temps d’y regarder de plus près, on constate que ces affirmations sont basées sur des évaluations arbitraires et des modèles théoriques dont l’applicabilité au modèle québécois reste encore à prouver.
Lors d’une tournée effectuée le printemps dernier, j’ai eu l’occasion, comme mes collègues du Comité exécutif de la FIQ, d’aller à la rencontre des professionnelles en soins de toutes les régions du Québec. De mes échanges avec elles, je retiens que les questions soulevées par la FIQ dans le dossier de la formation initiale étaient tout à fait pertinentes et justifiées et que les préoccupations de la Fédération rejoignent celles de ses membres, toutes professions confondues.
La FIQ a pu démontrer la fragilité des bases sur lesquelles s’appuient les tenants du baccalauréat obligatoire. Les risques que le plan initialement proposé accentue les effets négatifs de la pénurie d’infirmières sont bien réels. Alors que 15 000 d’entre-elles quitteront pour la retraite au cours des prochaines années, le moindre écueil qui viendrait s’ajouter à la pression, que subissent depuis déjà trop longtemps les professionnelles en soins au Québec, engendrerait des conséquences néfastes dont les effets seraient ressentis pendant plusieurs années, tant en termes de ressources humaines que de ressources financières.
S’il y a une leçon à tirer de l’histoire du réseau de la santé québécois, c’est bien de ne pas prendre de décisions importantes sur l’unique base de projections statistiques sans tenir compte de la réalité et des besoins du milieu. Les départs massifs d’infirmières à la retraite à la fin des années 1990, ça vous dit quelque chose?
La FIQ a procédé à une analyse rigoureuse, échelonnée sur plus d’une année. Il en ressort une proposition qui réponde à la fois aux consensus des partenaires, aux spécificités du système québécois d’enseignement collégial et supérieur et aux besoins criants du réseau de la santé et des services sociaux. Le modèle québécois intégré de formation infirmière, tel que mis de l’avant par la Fédération, permet une hausse significative du nombre d’infirmières détentrices d’un baccalauréat, tout en respectant les institutions québécoises, et ce, sans fragiliser le réseau de la santé et des services sociaux et celui de l’enseignement. La FIQ n’est donc pas contre le baccalauréat, c’est le caractère obligatoire de la proposition de l’Ordre qui est inacceptable dans le contexte québécois. En fait, notre modèle met en valeur toute la richesse et la diversité de la formation, de l’expérience et de l’expertise acquises par l’ensemble des infirmières du Québec qui contribuent tous les jours à mieux soigner la population québécoise.
L’OIIQ tient son prochain Congrès annuel en octobre. Ce sera l’occasion, je l’espère, d’aborder de front les questions qui nous préoccupent et qui demeurent à ce jour sans réponse.
Pour en apprendre davantage sur le modèle québécois intégré de formation infirmière développé par la FIQ, je vous invite à consulter la dernière édition de la publication FIQ en Action.
Bon été à toutes!