Je me souviens
Vous connaissez toutes cette belle devise québécoise qui se retrouve sur nos plaques d’immatriculation, mais vous souvenez-vous des grandes mobilisations passées des professionnelles en soins? Bien que, pour ma part, je ne les aie pas vécues, j’en ai énormément entendu parler par mes collègues et mes tantes infirmières.
Dans l’univers syndical comme ailleurs, on a tendance à oublier les contributions des femmes à l’histoire du Québec. À l’aube d’une nouvelle période de négociation, j’ai donc envie de vous parler de certaines grèves marquantes pour qu’on se rafraîchisse la mémoire ensemble.
Commençons par la première mobilisation illégale. Au printemps 1989, la toute nouvelle fédération syndicale, la FIIQ, entame des négociations avec le gouvernement pour la nouvelle convention collective de ses membres. Lorsque les instances de négociation présentent une première entente de principe à leurs membres, celle-ci est rejetée en assemblées générales. L’une des raisons principales : l’insuffisance de l’offre salariale.
Les membres réclament d’être payées à la hauteur de la valeur de leur travail, puisque soigner n’est pas une vocation! Plusieurs actions sont entreprises au cours de cette négociation, dont la grève des heures supplémentaires visant à démontrer que le refus de créer davantage de postes à temps plein – ce qui est souhaité par les membres – est non justifié.
Cette grève démontre l’ampleur du travail réalisé en heures supplémentaires, puisque 1 800 lits doivent alors être fermés. Le maintien des infirmières dans des postes précaires n’est donc dû qu’à l’entêtement des employeurs!
À l’automne, une grève illégale de 7 jours est également déclenchée par ces femmes à bout de leurs conditions de travail inacceptables. Vous avez probablement entendu parler des nombreuses sanctions qui, à l’époque, ont été infligées à ces infirmières : perte de salaire, perte d’ancienneté, amendes, en plus de l’annulation de la formule Rand.
Malgré toutes ces sanctions, ces femmes se sont tenues jusqu’au bout et elles ont eu gain de cause pour des conditions de travail améliorées. Elles ont notamment obtenu d’importantes hausses salariales, un rattrapage salarial ainsi que la création de postes à temps plein. Quant aux mesures disciplinaires imposées par le gouvernement, des engagements moraux ont été signés entre elles pour que l’ancienneté soit respectée lorsqu’elles postulaient à de nouveaux postes ou pour le choix de leurs vacances. Ce fut là une très belle marque de respect réciproque et, surtout, de solidarité!
Rappelons-nous maintenant la grève de 1999 qui a donné lieu à une autre grande mobilisation des travailleuses de la santé.
Le 26 juin 1999, devant l’impasse dans les négociations avec le gouvernement, les infirmières votent pour une grève générale illimitée dans le but d’obtenir des conditions de travail améliorées. La mobilisation se poursuit pendant près de 23 jours consécutifs. Plus de 47 500 professionnelles en soins se tiennent debout pour faire valoir leurs revendications, pour faire diminuer les fardeaux de tâches et pour avoir accès à des postes convenables, devant un gouvernement austère, obsédé par le déficit zéro.
Ce qu’il faut retenir de cette grève, c’est le courage de ces travailleuses qui se sont soulevées contre les mesures antisyndicales du gouvernement de l’époque. Elles ont fait le choix conscient de défier ce gouvernement et, pour cela, elles sont une inspiration pour le mouvement syndical d’aujourd’hui.
Même si ces grèves ont eu lieu il y a plusieurs années, le mouvement syndical infirmier est demeuré actif et plusieurs autres belles mobilisations ont été organisées. Collectivement, il faut se souvenir que les professionnelles en soins sont capables de se mobiliser. On entend parfois dire que les professions à majorité féminine sont moins mobilisées que les professions masculines quand vient le temps de négocier. Or, vous savez maintenant que c’est faux.
D’hier à aujourd’hui, les professionnelles en soins sont UNIES, DÉTERMINÉES et MOBILISÉES!
Hélène Vézina, Comité Condition féminine