3 avril 2020

Je veux commencer par dire que je ne blâme aucunement mes supérieures immédiates, car je crois qu’elles aussi sont à bout de ressources et qu’elles font du mieux qu’elles peuvent dans les circonstances. Je travaille au soutien à domicile au CLSC Thérèse-de-Blainville et je crois que nous sommes les grands oubliés de cette crise. Je dis que nous sommes oubliés, car je crois que le gouvernement et les employeurs oublient que nous sommes les vrais intervenants au front. Il n’y a aucun filet entre nous et les patients, aucun triage, aucun dépistage. Nous sommes directement en contact avec les milieux de vie de nos patients, leurs microorganismes, leurs microbes, leurs virus. Nous devons nous fier à la sincérité de nos patients lorsqu’on leur demande s’ils ont été en contact avec des gens symptomatiques ou non ou s’ils ont des symptômes. Malheureusement, les derniers jours nous ont prouvé que nous ne pouvons pas faire confiance à tout le monde. Certains patients ne nous disent pas la vérité. Et malgré cela, nous ne sommes pas plus équipés. Pas de jaquettes d’isolement, pas de gants, des masques et des lingettes désinfectantes distribués au compte-goutte.. Des communautés, comme la communauté juive de Boisbriand qui sont fortement en éclosion nécessitent de nos soins et certaines infirmières ayant été en contact avec des gens de cette communauté sont toujours parmi nous au CLSC, sans avoir eu de dépistage ni d’isolement préventif… utilisent les mêmes salles de bain, mêmes micro-ondes, mêmes imprimantes que toutes les autres. Je me demande en fait pourquoi on applique la quarantaine ailleurs dans la société, mais pas chez nous… Bref, avant de guérir, il faudrait penser à prévenir, parce que s’il n’y a plus d’infirmières pour prodiguer les soins des personnes à domicile et que les hôpitaux débordent, qui s’en occupera de ces patients? Où pensez-vous qu’ils se retrouveront? Rien pour désengorger les urgences en tout cas! Il faut arrêter de penser que les infirmières sont des super humains qui ne contracteront rien durant cette pandémie et mettre des moyens de protection à notre disposition.